Emploi et handicap : retour sur #35 ans de progrès [étude]
Lors d’un événement organisé avant-hier au ministère de la Santé et de la Prévention, l’Agefiph a célébré l’anniversaire de la Loi du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des personnes handicapées, un texte qui a notamment créé l’Agefiph il y a 35 ans. L’occasion pour son Président, Christophe Roth, de revenir sur les faits marquants et les avancées permises par la loi mais également de réunir des partenaires, des experts, des témoins et des entreprises, dont Google et Vinci, pour échanger sur les défis qu’il reste à relever pour construire un monde du travail inclusif.
Une table ronde et des interventions se sont notamment intéressées à l’influence des travailleurs handicapés sur la performance des organisations, à travers les enseignements d’une étude du Cercle Vulnérabilités et Société réalisée en partenariat avec l’Agefiph, AG2R La Mondiale et HandiEM.
Pour Christophe Roth, Président de l’Agefiph :
« L'adoption de la Loi du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des personnes handicapées a entraîné de profonds changements de méthode et de pratiques dans le monde du travail, et une nouvelle approche culturelle de la question du handicap. Des avancées concrètes qui doivent aujourd’hui s’accélérer : un peu moins de 500 000 personnes handicapées sont à la recherche d’un emploi, leur taux de chômage est deux fois plus élevé que la population active générale. Leur taux d’emploi dans le privé progresse trop lentement, j'ai pour ambition de le faire évoluer au-delà des 4%, d’ici à 2024. Un cap collectif pour lequel j’invite à la mobilisation de tous. Ensemble, employeurs, pouvoirs publics, acteurs de l’emploi, associations représentatives des personnes handicapées et partenaires sociaux nous pouvons construire un monde du travail inclusif, sans barrières pour les personnes en situation de handicap, sans discrimination et où les compétences sont prises en compte ».
Emploi et handicap, 35 ans d’avancées accompagnées par l’Agefiph
A noter : ces éléments permettent d’apprécier des évolutions en matière d’emploi des personnes en situation de handicap. Ces données sont toutefois à apprécier avec prudence car de nombreuses évolutions législatives et réglementaires sont intervenues pendant la période.
Une meilleure prise en compte de l’emploi
- Une augmentation régulière du taux d’emploi. Estimé en deçà de 2% avant la loi de 1987[1], il atteint 3,5 % en 2019 en Équivalent Temps Plein (et 4,8% en personnes physiques) ;
- Le nombre d’établissements assujettis est quant à lui passé de 50 000 en 1989 à plus de 100 000 en 2019 (dernier niveau connu) ;
- La part des établissements privés employant des personnes handicapées est passée de 60% en 2006 à 81% en 2019 ;
- A contrario, la part des établissements sans action positive (ni emploi direct, ni sous-traitance de personnes en situation de handicap) est passée de 29% en 2006 à 9% en 2019.
[1] Avec un objectif de 10 % pour les employeurs de 10 salariés et plus
Un fort développement des contrats en alternance
- En 1987, il y avait environ 250 personnes en situation de handicap en contrats en alternance. En 2021, on enregistre 11 400 personnes handicapées en alternance dont 8 700 contrats d’apprentissage ;
- Le nombre de contrats en alternance soutenus financièrement par l’Agefiph a augmenté, notamment dans la période récente marquée par le fort développement de l’apprentissage. Depuis 1990, l’Agefiph a versé une aide financière à l’occasion de la conclusion de plus de 93 000 contrats en alternance pour les personnes handicapées.
Une amélioration du niveau de formation
- Au sein des demandeurs d’emploi, sur les 10 dernières années, la part des personnes ayant au moins le niveau bac a progressé de 5 points pour les personnes handicapées (+ 4 points pour le tout public) et la part des personnes en situation de handicap qui ont un niveau inférieur au niveau V (BEP-CAP) a reculé de 5 points (- 3 points pour le tout public).
Une augmentation du nombre de recrutements
- En 1987, il y avait environ 7 000 embauches annuelles de personnes handicapées. En 2021, on enregistre près de 210 000 recrutements de personnes handicapées[1] ;
- En particulier le nombre de placements accompagnés par les Cap emploi a beaucoup augmenté. Depuis 1990, l’Agefiph a ainsi soutenu les recrutements de plus de 1,5 million de personnes handicapées.
[1] Recrutements de demandeurs d’emploi, source Pôle emploi
Une augmentation du nombre de créations ou reprise d’activité
- Au moment de la loi de 1987, il y avait une centaine de créateurs d’entreprises handicapés contre plus de 3 800 en 2021 (aidés par l’Agefiph) ;
- Depuis 1990, l’aide financière de l’Agefiph a contribué à près de 80 000 créations ou reprise d’activité par des personnes handicapées.
Une augmentation du nombre de personnes handicapées maintenues dans l’emploi
Retour sur l’étude Cercle Vulnérabilités et Société
« L’Observatoire de l’Emploi et du Handicap de l’Agefiph a pour objectif de nourrir la réflexion et le débat public mais surtout de contribuer à l’amplification des démarches qui soutiennent la construction d’un monde du travail inclusif. Nos publications et les études que nous soutenons, comme celle présentée aujourd’hui aux côtés du Cercle Vulnérabilités et Société, permettent de passer de la conviction, celle que nul n’est inemployable, à l’objectivation pour passer à l’action. »,
constate Véronique Bustreel, Directrice de l'innovation, des évaluations et de la stratégie de l'Agefiph.
pour Tanguy Châtel, sociologue et pilote de l’étude :
« Le sujet du handicap est aujourd’hui admis et reconnu par les entreprises, il existe une forme de légitimation mais le passage à l’acte ne se fait pas dans les mêmes proportions. Cette nouvelle étude nous a permis d’observer que l’inclusion des personnes en situation de handicap dans l’entreprise ne détériore pas leur performance, bien au contraire. Elle a des effets mesurés et significativement positifs d’un point de vue organisationnel et social en agissant par exemple sur la réduction des taux d’absentéisme, la cohésion des équipes, la qualité des services et des produits proposés, la capacité d’innovation ou encore la gestion des aléas ».
Basée sur une revue de littérature (143 publications nationales et internationales) et une enquête menée auprès de 666 entreprises (301 dirigeants et 458 managers), elle souligne que :
- Le handicap est perçu par les dirigeants interrogés comme le principal poste d’effort de l’entreprise, devant d’autres sujets tels que la parité ou la maladie ; il arrive en seconde position pour les managers, avec un effet d’amplification chez les Référents handicap.
- Le niveau de performance sociale et organisationnel lié à l’impact de la présence de travailleurs en situation de handicap dans l’entreprise est perçu comme élevé par les dirigeants comme par les managers.
- Pour les dirigeants, l’impact de la présence des travailleurs handicapés s’apprécie positivement, surtout en termes de cohésion interne, de qualité de ce qui est produit, d’absentéisme et de gestion des aléas et des imprévus.